Romain Poite analyse l’essai litigieux des All-Blacks contre les Bleus et dévoile quelle aurait été sa décision !

Romain Poite analyse l’essai litigieux des All-Blacks contre les Bleus et dévoile quelle aurait été sa décision !

Le dimanche 10 septembre 2023 à 21:13 par David Demri

16 Commentaires

Publicité

Une polémique est née au cours du match d’ouverture de la Coupe du monde entre le XV de France et les All-Blacks.

Le deuxième essai Néo-Zélandais pourrait être entaché d’un en-avant.

L’arbitre Sud-Africain Jaco Peyper a refusé de revoir cette action à la vidéo et a directement accordé l’essai.

Pendant le direct, Benjamin Kayser en avait mal au coeur. Extrait:

« Faut pas trop les regarder, les ralentis, parce qu’on va se faire mal au cœur… » 

Sur les réseaux sociaux, la polémique ne cesse de grandir.

Interrogé via Midi Olympique, l’ancien arbitre du Top 14 et désormais technicien du Rugby Club Toulonnais, Romain Poite a réagi. Extrait:

« C’est un match où 29 caméras sont disposées autour du terrain et l’arbitre vidéo a accès à de nombreux angles. Contrairement au Top 14, il travaille en collaboration étroite avec un technicien vidéo mis à sa disposition. Dans notre championnat, nous sommes dépendants des choix du réalisateur et des angles qu’il met à disposition. Cela peut parfois créer de longues attentes et des situations conflictuelles pour l’arbitre quant au choix des angles demandés. À l’international, où l’on souhaite limiter les arrêts de jeu, le TMO (« television match official », comprenez l’arbitre vidéo) est constamment en action.

Il est à l’écart, accompagné du technicien TV qui met à sa disposition les angles qu’il demande pour effectuer ses vérifications. Devant lui, il a un écran partagé en quatre pour visionner plusieurs angles en même temps, et un deuxième écran qui propose l’action en décalé. L’arbitre dit au technicien, « je veux voir tel angle ; remets-moi l’autre angle ». Même si Jaco Peyper n’a pas fait un appel formel à la vidéo, il est certain que l’arbitre vidéo a analysé cette situation sous de nombreux angles, pas seulement ceux proposés par la télévision. Dans un match avec une telle pression, tout est décortiqué. Ils ont donc pris leur décision en pleine connaissance de cause. »

Il précise que les arbitres bénéficient d’une technologie très développée désormais. Extrait:

« À l’international, l’arbitre vidéo dispose d’une technologie très développée et efficiente. Elle se nommait Hawke Eye pour les Coupes du monde en 2015 et 2019. C’est une technologie qui permet de revoir la même action sur écran partagé, sous des angles de caméra différents et en simultané. C’est un outil qui donne généralement d’excellents résultats. »

Dans la foulée, Romain Poite donne son avis sur cette action qui fait polémique.

Il y a-t-il en-avant ? Romain Poite affirme qu’il aurait lui aussi accordé l’essai. Extrait:

« Il faut comprendre le cheminement qui amène cette décision. D’abord, son arbitre de touche M. Ridley est très bien placé et lui confirme immédiatement qu’il juge la passe valide en levant le pouce. Jaco Peyper le suit et valide l’essai. Ensuite, il sait que l’arbitre vidéo va effectuer ses vérifications en off. Que regarde-t-il ? La dynamique des mains et du ballon. Il juge alors que si le ballon part ou non vers l’avant à la sortie des mains, d’un point A (émetteur de la passe) à un point B (réceptionneur). 

À revoir plus précisément, mais le geste des mains semble effectivement être au moins sur la latéralité. Il décide donc de valider lui aussi l’essai. Quand j’ai vu les images, si j’avais été à leur place, je crois que j’aurais moi aussi validé cet essai. Mais ce n’est pas une situation simple. J’ai échangé avec l’un des arbitres de cette Coupe du monde 2023 pour avoir son avis. Il m’a répondu qu’il était comme moi, que la situation n’était pas claire et évidente mais que lui aussi aurait sûrement accordé l’essai. »

Dans la foulée, Romain Poite explique que les consignes sont différentes entre celles du Top 14 et celle du rugby international. Extrait:

« Les approches et analyses sont différentes entre le Top 14 et le niveau international. Quand World rugby a introduit la notion d’inertie pour juger des en-avant de passe, suite à une démonstration des Australiens, nous l’avons évidemment intégrée en Top 14. Avec le temps, nous nous sommes heurtés à des situations trop polémiques. Cela crée des situations d’arbitrage assez confuses et difficiles à lire pour le public. Nous sommes revenus à l’essence de la règle concernant la façon d’analyser ces passes, avec le jugement d’une passe par sa direction entre son point de départ et son point d’arrivée.

À l’international, toutefois, il fallait coller au protocole World Rugby. Personnellement, pour juger de ces situations, je me servais aussi du type de passe. Une passe vissée, avec une vitesse initiale accentuée par sa rotation, peut effectivement être sujette à l’effet d’inertie. Je la jugeais avec un peu plus de tolérance qu’une passe longue lobée, un peu flottante, pour laquelle je m’appuyais plus facilement sur la direction du ballon que la direction des mains. »

Pour conclure, Romain Poite estime que Jaco Peyper et ses assistants ont eu une bonne réaction face à une action litigieuse. Extrait:

« Sa gestuelle et celle de son arbitre de touche, M. Ridley, sont également importantes. De bout en bout, ils ont une gestuelle très affirmée. Ils montrent qu’ils sont sûrs de leur décision. C’est important dans le message envoyé : quand j’étais jeune arbitre, mon mentor me disait toujours qu’il valait mieux juger avec ses forces et ses faiblesses avec 150 % de certitude que de faire transpirer le doute et d’en être sûr à 50 %… Quand vous n’êtes pas sûr de vous, les joueurs et le public le ressentent. Cela crée de la confusion. » 

Publicité

16 Commentaires