A trois jours du match décisif face à l’Ecosse en clôture du Tournoi des 6 Nations, le demi d’ouverture du XV de France Romain Ntamack a fait le point en conférence de presse sur son retour en bleu, sa forme actuelle et les faits de jeu observés en Irlande. Dupont, Ringrose, le Toulousain n’a parfois pas mâché ses mots.

Comment caractériser ce match contre l’Irlande, est-ce que pour toi c’est une victoire référence ?  

Une victoire en Irlande, ce n’est jamais anodin, surtout avec l’écart au score, c’est évidemment un point de bascule, que ce soit sur la défense, sur l’état d’esprit. Quand tu perds le meilleur joueur du monde, tu peux dire que ça va être compliqué, mais on en met quasiment 40 sans lui donc ça montre les ressources de l’équipe. Ça montre une énorme prise de confiance pour bien finir le tournoi.

Après une telle victoire, comment éviter la décompression ?

On sait très bien que l’on n’a pas fait le plus dur, qu’il va falloir confirmer ce week-end face à l’Écosse pour pouvoir remporter un titre. Je pense qu’on a un groupe assez expérimenté pour savoir gérer ce genre d’évènement, approcher ces matchs avec beaucoup de légèreté, mais aussi beaucoup de concentration et détermination.

On s’est dit que la performance réalisée en Irlande ne nous garantissait en rien de gagner ce week-end face à l’Ecosse. On est concentrés, très déterminés depuis le début de la semaine et on a envie de faire un grand match samedi.

Est-ce que l’Ecosse est le profil d’équipe qui peut vous embêter ?

Ça peut être un match piège, mais on est une équipe expérimentée. On sait très bien à quoi s’attendre contre l’Écosse qui a des joueurs de classe internationale et on prend cette équipe au sérieux. On sait gérer ce type d’événements pour ne pas tomber dans le piège. Mais depuis le début de la semaine, je sens que le groupe est déterminé 

Samedi, tu vas croiser la route de Blair Kinghorn, ton coéquipier à Toulouse, comment tu appréhendes ça ?

Au-delà du super joueur, c’est un super mec qui s’est vite intégré à Toulouse qui a toujours le sourire et le mot pour faire rire. L’avoir en adversaire ce week-end ce sera évidemment un peu spécial, mais au plaisir de boire une bière avec lui à la fin du match. Avant tout, on doit se méfier de lui, car c’est un super joueur avec de grandes qualités.

Est-ce que cette défaite de 2021 dans le dernier match du Tournoi face à l’Ecosse est encore dans vos têtes ?

Ce n’était pas exactement le même scénario, il fallait qu’on gagne de plus de 25 ou 30 points. Evidemment que les joueurs qui faisaient partie de ce match l’ont toujours dans un coin de la tête. Mais ce week-end, sera un scénario différent avec des joueurs et un contexte différent et il va falloir l’aborder de la meilleure des manières parce que c’est une équipe très dangereuse et très pénible à jouer. Elle nous pose souvent des difficultés et chaque match contre eux est serré. A nous d’être très concentrés et déterminés pour les battre ce week-end. 

Malgré ta longue blessure et ta suspension, tu sembles avoir conservé la pleine confiance de Fabien Galthié, comment tu vis ça ? 

C’est important d’avoir la confiance de ses coachs, du sélectionneur et de ses coéquipiers. Je me sens bien, j’ai fait les efforts nécessaires pour revenir opérationnel face à l’Irlande et aujourd’hui, j’ai envie d’enchaîner et de laisser les petits bobos et les coups d’arrêts derrière moi.

L’équipe de France a marqué 26 essais dans le Tournoi et se rapproche du record (28). Comment tu décrirais votre plan de jeu ?

Il a évolué et est tourné vers l’offensive. Avec les joueurs qu’on a, c’est évidemment normal d’exploiter la qualité des joueurs derrière. Tout le monde adhère à ce système de jeu et c’est en progrès depuis la tournée de novembre.

Sur le tournoi, c’est plutôt abouti donc on travaille dans ce sens-là et encore une fois les stats parlent pour nous. On est la meilleure attaque du Tournoi ce n’est quand même pas anodin, ça veut dire que notre travail paye.

Malgré tout, en équipe de France, tu prends peu d’initiative, tu as un rôle de distributeur, est-ce que tu es parfois un peu frustré ?

Non, il n’y a aucune frustration. Il y a des matchs où ça ne s’ouvre pas donc je me dois de distribuer. Il y en a d’autres ou ça s’ouvre un peu plus et je prendrai les intervalles comme je l’ai déjà fait.

Quand on a des fusées aux quatre coins du terrain, c’est bien de les servir dans les meilleures conditions, surtout quand ça va derrière la ligne. Je me suis appliqué sur ce que j’avais à faire en défense et ma communication. C’était un match où j’avais besoin de me rassurer sur des choses simples et efficaces et je pense qu’on a plutôt bien géré le match avec Max (Lucu) et Tom (Ramos) derrière.

Avec le banc en 7-1, il y a beaucoup de rotations derrière, Oscar Jégou notamment a joué au centre à Dublin, comment vous gérez ça ?

Oscar est amené à être souvent à côté de moi. J’essaye de le mettre à l’aise et de le faire défendre à l’intérieur comme un troisième ligne. Il sait lire les trajectoires des attaquants, on a pu le voir ce week-end face à l’Irlande, il n’a pas été très perturbé de son entrée au centre. 

Maxime Lucu a remplacé Antoine Dupont avec brio à Dublin, il va encore jouer samedi, qu’est-ce que ça change de jouer avec lui ?

Vous dire que ça ne change rien d’avoir Antoine sur le terrain, ce serait mentir… Mais c’est vrai que Max a fait une super entrée, il a été brillant et le sera de nouveau ce week-end. C’est un joueur différent d’Antoine, mais il est à fond dans le collectif avec beaucoup de leadership. Il fait de super matchs avec Bordeaux, il en fait aussi avec l’équipe de France. Je ne suis pas inquiet du tout sur sa performance. 

Antoine Dupont a tenu à rester avec vous à Marcoussis malgré sa blessure, quel a été son rôle ?

Il avait envie de rester avec le groupe. Mais il est assez meurtri, assez abattu. Je pense qu’il ne veut pas trop nous montrer sa déception, donc il reste un peu à l’écart.

Nous aussi, on a bien évidemment une pensée pour lui, on aura un supplément d’âme samedi soir et ce sera un levier de motivation pour jouer et gagner un titre pour nous et pour lui. On sait qu’il est là et qu’il nous soutient.

Après les blessures de Pierre-Louis Barassi et Antoine Dupont, les citations de Fabien Galthié n’ont pas été entendues par la commission de discipline. Et le pilier irlandais Andrew Porter dit que c’est un fait de jeu, qu’il dort bien la nuit… Comment tu vois ça ?

J’ai mon avis là-dessus, je le garderai pour moi. C’est toujours délicat d’avoir un joueur qui se blesse sur une action comme ça, ce n’est jamais très clair dans ce genre de situation.

Les rucks, ça restera un débat infini dans notre sport, mais il faudra s’asseoir autour d’une table et clarifier un peu tout ça pour mettre en place de vraies règles pour tout ce qui est jeu déloyal, que ce soit sur Antoine ou même sur Pierre -Louis.

Je pense que dans d’autres circonstances, peut-être à l’inverse, nous, on aurait pris un carton rouge donc c’est frustrant surtout quand les joueurs sont privés d’un dernier match dans le tournoi. Il y a beaucoup de rage et de frustration et encore une fois, j’espère que ça servira au groupe pour récompenser ces deux joueurs-là. 

Est-ce que tu considères ta sanction après ton carton rouge injuste, étant donné que l’Irlandais Garry Ringrose a pu purger sa suspension dans un match de club et pas toi ?

 Oui il y a clairement une forme d’injustice, d’incompréhension. Je pense qu’on avait monté un dossier et bataillé pour prouver que j’allais jouer avec mon club. Quand on voit 10 jours après le total inverse de ce qu’ils m’ont dit à la commission, ça reste incompréhensible. Il va falloir taper du poing sur la table, car ça ne peut pas toujours être en notre défaveur et toujours nous coûter cher sur ce genre de commission. C’est un peu rageant. Mais encore une fois, il faut qu’on se concentre sur l’objectif de remporter le tournoi.

Via RMC Sport