C’est sans doute la décision de Philippe Saint-André qui sera la plus discutée au moment de débriefer la défaite de l’équipe de France contre l’Irlande. Alors que son équipe subissait la loi des Irlandais, le sélectionneur a choisi de changer très tôt sa charnière. Dès la 55e minute exactement. Si l’entrée de Morgan Parra à la mêlée peut se justifier par une volonté de proposer un registre différent pour enfin déstabiliser l’omniprésent Sean O’Brien et ses partenaires, le remplacement de Frédéric Michalak par Rémi Talès interroge davantage. Il n’est pas là question d’homme, mais bien de profil.

Le néo-Racingman est en effet connu pour son application, sa rigueur tactique et sa capacité de gestion. Pas vraiment pour être un « super sub », un « match winner » capable de dynamiter le jeu de son équipe. Or, à cet instant, l’heure n’était pas à l’économie pour les Bleus. Acculés dans leur camp, privés de ballon, ils étaient davantage à la recherche de l’étincelle qui aurait pu rallumer la flamme et faire douter un XV du Trèfle en mode rouleau compresseur.

Michalak, le facteur X

Cette faculté à sortir un tour de son chapeau, à oser le geste spectaculaire au bon moment, à trouver le petit trou de souris dans la défense adverse, à réveiller ses coéquipiers par une action d’éclat, correspond davantage au tempérament de Frédéric Michalak. Si l’ouvreur s’est assagi depuis ses débuts toulousains, il démontre encore régulièrement qu’il a conservé toute sa vista. Et ce grain de folie, de génie qui peut transformer une simple attaque placée en occasion d’essai. A l’image de cette feinte de passe suivie d’une prise d’intervalle, qui a amené l’une des seules accelérations françaises dans le premier acte (15e). L’ancienne légende irlandaise Brian O’Driscoll, jeune retraité et consultant pour la télévision anglaise lors de cette Coupe du monde, avait d’ailleurs identifié le Toulonnais comme le facteur X des Français dans cette rencontre.

Certes, l’ouvreur n’est jamais aussi à l’aise que quand son équipe joue dans l’avancée, ce qui n’était clairement pas le cas de dimanche. Il n’empêche. Sa sortie prématurée reste entourée de mystère. Réel choix tactique de PSA ? Aveu d’impuissance du sélectionneur qui souhaitait déjà préserver son maître à jouer en vue du choc infernal contre les All Blacks ? Fatigue ressentie par l’ouvreur que l’on sait aussi généreux en défense et qui a dû s’employer comme tous ses partenaires dès la première minute ? Ou gêne ressentie à l’épaule, alors qu’il était resté au sol suite à l’action qui a mené au premier essai irlandais quelques instants plus tôt ? Autant de questions qui ne manqueront pas d’être posées au patron des Bleus, même si ce fait de match n’explique pas à lui seul – loin de là – la marée verte qui a déferlé sur le XV de France.

Source: rugbyrama.fr