Le demi d’ouverture du XV de France qui débutera contre l’Angleterre retrouve une place de titulaire avec les Bleus. Avec 34 sélections au compteur mais un statut dégradé dans la hiérarchie des n°10 derrière Ntamack, Ramos voire Antoine Dupont, Matthieu Jalibert semble avoir tout à gagner en cas de grande performance à Twickenham. Même si la pression n’a jamais été aussi forte sur le taulier de l’UBB.

Sa semaine de préparation a été « normale », d’après Thomas Ramos. Mais les habitués des débuts de semaine à Marcoussis auront tout de même noté la petite touche de concentration supplémentaire lorsque la tendance d’une titularisation s’est dessinée lundi dernier. Matthieu Jalibert joue gros à Twickenham ce samedi et il le sait. D’autres se disent qu’il n’a rien à perdre.

Le problème peut en effet se lire dans les deux sens. Écarté des 23 pour affronter le pays de Galles après avoir eu besoin de se régénérer en novembre, rien ne laissait présager pareille opportunité pour l’ouvreur bordelais. Le carton rouge pris par Romain Ntamack lui entrouvre la porte. Et Jalibert compte bien s’y engouffrer. Son entourage proche est conscient de la pression qui l’entoure mais en Gironde on n’est pas inquiet.

« On l’a connu jeune, insouciant dans ses formes de jeu, dans sa capacité à s’amuser sur le terrain et à être toujours assez facile par rapport à la pression, détaille Julien Antonin actuel manager des crabos de l’UBB. C’est un leader de jeu. Il est vraiment suffisamment costaud pour endosser ce rôle de n°10 des Bleus malgré le contexte ».

« Toujours mieux quand on est désiré que quand on est là par nécessité »

Même si Fabien Galthié évoque « une cohérence et une évidence » pour argumenter le choix de Jalibert contre l’Angleterre, les faits de ces derniers mois semblent moins catégoriques. « On est toujours mieux quand on est désiré et choisi que quand on est là par nécessité« , analyse l’ancien sélectionneur des Bleus entre 1991 et 1995 Pierre Berbizier. « En équipe de France, il va et il vient. Il a besoin de confiance. Moi je l’aurais essayé bien avant. Pour ce match, il faut de la confiance. Le prendre pour lancer la pièce et voir de quel côté elle retombe, ce ne sont pas des conditions idéales. Ce n’est pas très confortable pour lui ».

En 34 sélections avec le XV de France, Matthieu Jalibert n’a pas réussi à faire l’unanimité. Mais il a toujours réussi à nourrir une concurrence féroce, saine, avec Romain Ntamack grâce à ces éclairs en bleu et ses excellentes performances en club. « Jalibert, on lui fait un peu un procès depuis quelques semaines mais c’est quand même un excellent joueur », lâche l’ancien n°10 des Bleus et consultant RMC Sport Yann Delaigue. « Il a fait de très bons matchs avec l’équipe de France, pas que des bons mais il y en a eu des très bons aussi. Il propose quand même pas mal de garanties, plus offensives que défensives ».

« Jalibert? C’est un champion »

C’est certainement la raison principale des doutes qui habitent le staff des Bleus à chaque fois qu’il faut cocher son nom sur la feuille. « Il a de la classe, il démontre à Bordeaux que c’est le meilleur demi d’ouverture du Top 14. Au moins maintenant, son rôle est clair, il sait pourquoi il est là », poursuit Phillipe Saint-André, ancien sélectionneur de la France entre 2011 et 2015. « Jalibert doit montrer à Galthié qu’il peut compter sur lui, que ce n’est pas qu’un 25e homme. Il l’a déjà montré, mais là il doit être efficace. Il a beaucoup à gagner mais aussi beaucoup à perdre parce que s’il passe à travers, il sera loin dans la hiérarchie ».

Mentalement, le demi d’ouverture bordelais semble armé pour gérer ce match à Twickhenham, un lieu qui lui réussit d’ailleurs plutôt bien avec les Bleus. « C’est un champion et un compétiteur, il aime la pression et là il va en avoir« , continue PSA.

« Il va montrer à ses détracteurs qu’il sait gérer cette pression« , pense le consultant RMC Sport.

Dans ce XV de France où la défense est primordiale et le projet offensif tourne autour d’Antoine Dupont, Matthieu Jalibert va vite devoir retrouver ses repères. « Mais là aussi il en a l’habitude, ce n’est pas la première fois qu’il joue pour cette équipe de France« , souffle Delaigue. « C’est sur ce talent offensif qu’il va falloir qu’il fasse des différences. Mais tout le monde l’attend sur son côté défensif parce qu’on sait que les Anglais vont un peu le viser ».

« Une opportunité énorme à saisir »

L’ouvreur des Bleus est en tout cas apaisé après avoir pu s’expliquer longuement avec le sélectionneur et aborde ce match avec excitation. « Le très haut niveau, c’est impitoyable« , termine PSA. Il a la chance d’être titulaire et de jouer dans le temple du rugby mondial. On verra si c’est un cadeau ou un cadeau empoisonné. Il ne rentre pas dans une équipe de France en difficulté, il rentre dans une équipe où ça va bien. On a le meilleur joueur du monde dans l’équipe, Ramos meilleur buteur. Pour moi, c’est une opportunité énorme, mais c’est à lui de la saisir. Le haut niveau, si tu loupes une opportunité, tu ne peux t’en prendre qu’à toi-même… »

Avec le potentiel retour de Romain Ntamack contre l’Italie, Matthieu Jalibert veut briller en Angleterre. Pour replacer une nouvelle fois au centre de la table l’éternel débat sur l’identité du 10 titulaire des Bleus. Pour enfin laisser les polémiques derrière lui et faire comprendre à tout le monde que son talent reste indispensable en équipe de France.

Via RMC Sport