Frédéric Michalak: « Je suis rentré en France, pour l’équipe de France »
Frédéric Michalak: « Je suis rentré en France, pour l’équipe de France »
Le samedi 22 août 2015 à 13:37 par David Demri
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Frédéric Michalak, sélectionné pour la première fois en 2001, va devenir ce soir le joueur à la plus grande longévité en équipe de France. Et il pourrait y ajouter le record de points en bleu…
Treize ans, neuf mois et douze jours. Ce n’est plus une carrière, c’est une vie que Frédéric Michalak aura passée en bleu. Et quelle vie ! On en aura résumé une bonne partie en écrivant qu’elle a failli s’arrêter plusieurs fois, en 2007, en 2010, en 2013, et même cette année. Parce qu’il s’est souvent blessé, qu’il a été irrégulier et que ses défauts ont parfois davantage pesé que ses qualités aux yeux des sélectionneurs. Mais il est toujours là, donc, 5 033 jours après la première fois, le 10 novembre 2001, quand il avait participé quelques secondes à une victoire contre l’Afrique du Sud (20-10) à Marseille, remplaçant François Gelez. Ce soir, Michalak peut battre deux records de l’histoire de l’équipe de France : celui de meilleur marqueur et celui, donc, de la longévité (voir par ailleurs) . Quand, lors du stage à Tignes le mois dernier, on a évoqué cette dernière marque avec Michalak, il n’en savait rien.
« BATTRE ce record de longévité vous procure quel sentiment ?
– C’est bien d’être encore là, mais j’aurais aimé jouer beaucoup plus de matches. Quand tu n’es pas pris alors que tu sens que t’es en pleine forme et que tu devrais y être, c’est compliqué à gérer. Tu essaies de trouver des explications, alors que parfois ce n’est pas la peine, ce sont juste des choix d’hommes. Mais tu es toujours en train d’espérer. Comme pendant la Coupe du monde 2011. Je me disais : “S’il y a des blessés, peut-être que…”(Jean-Marc Doussain avait été appelé pour suppléer David Skrela).
Vous vous disiez quoi dans ces cas-là ?
– Il faut accepter. Tenter une aventure, ce que j’ai fait en Afrique du Sud (il a joué aux Sharks de Durban en 2008 puis en 2011-2012). Se remettre à chaque fois dans des situations difficiles, ne pas s’habituer à la facilité. J’ai toujours cherché à positiver.
Avez-vous déjà pensé que c’était fini pour vous ?
– Jamais. Ça tourne. Et en plus, en équipe de France, on sait que ç’a beaucoup tourné (sourire). À tous les postes. On n’a pas cette joie d’être installé.
On sent que vous auriez aimé connaître ça…
– C’est toute une structure à avoir. Dans certains pays, la Fédération contrôle tout : si un joueur est le numéro 1 à ses yeux, il joue dans son club, point. Tout est différent ici. Il faudrait permettre à ces joueurs français d’être encore meilleurs, de jouer dans leur club. Il faudrait aussi que les jeunes joueurs puissent intégrer les équipes pros.
Le paradoxe est que vous avez dû renoncer à l’équipe de France en partant disputer le Super 15, pour mieux y revenir.
– Je n’y ai pas renoncé, c’est elle qui ne voulait plus de moi. Donc j’ai préféré aller affronter les meilleurs joueurs du monde dans un autre Championnat. J’ai pu avoir une bonne préparation physique, j’ai pris quelques kilos, tout ça m’a permis de faire des matches pleins. Et sans pression, aussi. Puis Philippe (Saint-André) m’a appelé, il a voulu m’essayer, je suis parti en tournée en Argentine (en juin 2012). Et, derrière, je suis rentré en France, pour l’équipe de France. Sinon, je serais resté en Afrique du Sud. Je voulais revenir en bleu. Aller à la Coupe du monde a toujours été le plus gros objectif dans ma carrière.
Qu’est-ce qui vous lie profondément à l’équipe de France ?
– Le fait de jouer au plus haut niveau. Jouer contre les meilleurs du monde. Surtout, représenter son pays. C’est ce qui me donne le plus de plaisir.
Vous sentez-vous patriote, fortement français ?
– Moi, je suis un enfant du monde (sourire). Je dis souvent ça parce que j’aime voyager, partager, découvrir différentes cultures, vivre d’autres expériences. Mais jouer sous le maillot bleu, c’est le plaisir de gamin. Quand je regardais le Tournoi des Cinq Nations, avec tous les anciens, le drop de Thomas Castaignède (contre l’Angleterre, 15-12, le 20 janvier 1996)…
Que reste-t-il du Michalak de 2001 ? C’est la même personne ?
– Non, pas du tout. Vous, vous êtes la même personne qu’à vingt ans ?
Il reste des choses, fatalement !
– Pas forcément, non. Je suis passé par plein d’expériences pour arriver à ce que je suis aujourd’hui. Il fallait faire ce travail-là.
Vous diriez quoi au Michalak de 2001 si vous le croisiez ?
– Je n’en sais rien. Je ne m’en souviens même plus (il rit). Aux jeunes d’aujourd’hui, je leur dis comme on me disait à moi : “Vous verrez, ça va vite.” Et sinon, je subis leur connerie. Il ne faut pas laisser traîner le téléphone par exemple, sinon je peux retrouver des photos bizarres par exemple (sourire).
Vous n’étiez pas le dernier à déconner en 2001…
– Exactement ! La ”routourne” a tourné, comme dirait l’autre (rire).
Ces presque quatorze années vous semblent un long chemin ?
– Ouais. Et en même temps j’ai l’impression que c’était hier. Les anciens disaient : “Vous allez voir, ça passe vite.” On se foutait un peu d’eux, on les appelait ”les vieux”. Ils avaient raison.
Comment expliquez-vous que vous ayez duré aussi longtemps ? Le talent ?
– (Sec.) Non. Le talent ne fait pas tout. Au début, oui, le talent, ça va, ça marche un peu. Le truc, c’est le travail, le travail, le travail : il n’y a que ça qui fait qu’on revient en équipe de France. Surtout que moi, j’ai eu des blessures.
Justement. Vous avez duré malgré un gabarit…
– (Il coupe en souriant. ) Très musclé.
Vu l’évolution du jeu, avez-vous pensé à un moment que ce gabarit (1,82 m, 85 kg) pouvait être un frein à votre carrière ?
– Pas forcément, non. Je joue avec mes talents. Mon objectif, c’est de faire jouer les autres, d’avoir des bonnes courses, d’avoir du recul sur le jeu, d’avoir un bon jeu au pied. Si déjà je suis bon là-dedans, c’est bien. Ce qui est sûr, c’est que je n’allais pas prendre vingt kilos.
Quels moments avez-vous préférés dans ces quatorze années en bleu ?
– Je n’ai pas envie de garder que les grosses victoires. Il y a aussi les grosses défaites, les Coupes du monde perdues. C’est ce qui forge le caractère d’un joueur. Au final, j’ai simplement l’impression d’être un privilégié.
Parfois, l’équipe de France vous a aussi énormément exposé, et pas toujours positivement…
– C’est comme ça, hein… (Il sourit.) On fait ce métier, on l’a choisi. À un moment, je me suis créé une carapace, parce que c’était lourd. Mais aujourd’hui, les joueurs, comme Mathieu Bastareaud ou d’autres, sont plus libérés, vont vers les autres. C’est ça le rugby : rester ouvert.
Croyez-vous avoir une place dans l’histoire du quinze de France, encore plus avec ce record ?
– Pfff, c’est pas important ça ! La place la plus belle, ce serait d’être champion du monde. »
ALEX BARDOT ET LAURENT CAMPISTRON – L’équipe
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2 Commentaires
grace a qui il est revenu en France ? quel club en voulait? le ST , il a peut être oublié!!!
Quoiqu’on en pense, ce type est un sacré joueur. Et mentalement, ne jamais avoir lâché, je dis chapeau. Ce sera peut être lui le facteur X. Et puis peut être qu’il n’ira même pas…