Eric Bayle a eu extrêmement peur lors de l’inquiétant KO de Samuel Ezeala, en 2018

Eric Bayle a eu extrêmement peur lors de l’inquiétant KO de Samuel Ezeala, en 2018

Le jeudi 1 août 2024 à 10:18 par David Demri

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Lors d’un long entretien accordé à Midi Olympique, Eric Bayle s’est confié sur le rugby Français.

Ce-dernier explique que Canal + n’a jamais poussé pour faire en sorte que les règles de ce sport évoluent, comme cela a pu parfois être le cas dans l’hémisphère Sud. Extrait:

Ça doit rester un sport. Je rappelle à cette occasion que Canal + n’a jamais poussé pour une évolution de règle, contrairement aux chaînes de l’hémisphère Sud qui, à cause de la concurrence du XIII et du foot australien, ont toujours cherché depuis le début du professionnalisme à influencer le règlement pour tendre vers un rugby plus spectaculaire, avec plus de temps de jeu, plus d’espaces, et cela continue encore aujourd’hui. 

Il espère cependant que ce sport va continuer à être spectaculaire dans les années à venir. Extrait:

Il faut que ça reste un sport, mais que ce sport soit spectaculaire car la concurrence est effrénée. En 1995, quand nous avons commencé, il y avait peu de sport à la télévision. Aujourd’hui, non seulement il y en a beaucoup mais la consommation de télévision baisse, les gens ont des sollicitations différentes à travers leurs écrans, le raccourcissement de la durée d’attention fait que ces derniers ne piochent souvent qu’une vingtaine de minutes d’un programme… Donc oui, il faut du spectacle, mais ce spectacle, on l’a. 

Il explique ensuite pourquoi le spectacle est toujours au rendez-vous. Extrait:

D’abord parce que la qualité de la captation (on est passé de 6 ou 7 caméras, ce qui était pourtant le grand luxe à la création de Canal, à une quarantaine aujourd’hui sur la finale) et la qualité de l’image sur les écrans de télé sont aujourd’hui énormes. Mais aussi parce que les écrins dans lesquels nos clubs évoluent n’ont plus rien à voir avec ceux d’il y a trente ans, on est passés des stades de campagne à des enceintes professionnelles, bien éclairées, avec des pelouses impeccables, qui donnent un écho flashy.

Quant aux matchs, ne soyons pas méchants avec nos anciens car je n’aurais surtout pas voulu vexer le regretté André Boniface, mais  ceux d’aujourd’hui sont quand même beaucoup plus agréables à commenter que les anciens… Avant, tu parlais essentiellement pour meubler les temps morts, aujourd’hui c’est davantage pour commenter du jeu. Même si sur 80 minutes il reste encore des temps morts, heureusement…

Le spectacle va avec la qualité des joueurs, la starification de certains et la qualité de la captation. Le rugby a fait son trou sur Canal, essentiellement parce qu’il est extrêmement télégénique. Les « loupes » de Canal ont apporté à l’époque un vrai plus par rapport au foot et au basket, par exemple. Et avec les moyens actuels, il l’est encore plus.

Il avoue cependant avoir eu peur à plusieurs reprises d’assister au pire sur un terrain de rugby, avec une blessure très grave. Extrait:

Plusieurs fois, il a failli arriver. L’accident de Max Brito a dû arriver sur Canal, car nous avions 25 matchs de la Coupe du monde, alors que TF1 en avait 7. Mais ce n’était pas moi aux commentaires ce jour-là, et en plus, à l’époque, on n’avait pas toutes les infos. Il était sorti sur une civière, on ne savait pas ce qui était arriver et ce qui allait se passer… L’accident de Jean Daudé, aussi, je m’en souviens : c’est arrivé sur Canal, un Castres-Bourgoin en 2000. Ce n’était pas un direct majeur, mais c’était dans Jour de rugby, que je présentais. Enfin, j’étais au Racing le jour de l’accident de Samuel Ezeala (le 7 janvier 2018, NDLR). 

Il affirme avoir eu extrêmement peur lors de la blessure contractée par Samuel Ezeala contre le Racing 92. Extrait:

Évidemment, avec ce grand drap blanc, il y a eu de grands moments d’inquiétude derrière le micro. On pensait à sa famille, et bien évidemment que dans ces moments-là, le commentateur en arrive à s’inquiéter, et à se poser la question de savoir s’il va devoir commenter le pire, comme cela est déjà arrivé en Formule 1. L’évolution des règles va dans le bon sens, et on se doit d’être irréprochables dans nos commentaires par rapport aux situations de jeu déloyal.

On nous a d’ailleurs souvent reproché de parler de jeu déloyal plutôt que de jeu dangereux, ce n’est pas faux, car la nuance existe… Aujourd’hui, on ne peut pas reprocher à un arbitre de mettre un carton rouge quand la tête est touchée. L’avenir du rugby est là-dedans, il n’est pas dans le nombre d’essais marqués ou le temps de jeu effectif. Et il ne restera ensoleillé que tant que la sécurité des joueurs sera assurée. Comme c’est un débat très actuel, il est du devoir des commentateurs, des entraîneurs et des dirigeants de ne pas remettre en question les décisions des arbitres, comme cela a encore pu être le cas sur les demi-finales. C’est absolument essentiel.

Il explique d’ailleurs que certains commentaires ont évolué avec le temps. Extrait:

La manière dont on a pu glorifier le retour en jeu d’un Florian Fritz tout ensanglanté (lors d’un Toulouse-Racing en 2014, NDLR), c’est terminé. À l’époque, on n’avait pas bien perçu s’il était commotionné ou pas, mais le rugby c’était encore ça : l’image de l’icône Jean-Pierre Rives, du sang sur son maillot…

Les contacts sont bien plus forts, les joueurs peuvent manifestement mettre en danger leur adversaire, alors on se doit d’être encore plus rigoureux. À ce titre, j’ai évolué dans mes commentaires, c’est évident. À mes débuts, il m’est arrivé de glorifier le retour de joueurs en sang, de m’exclamer « quel courage ! » pour un gars qui s’était relevé en sang et continuait à jouer en titubant… On a appris depuis, heureusement. Je le répète : la clé de la médiatisation du futur rugby passe par là, plus que par l’amélioration du jeu ou la starification de ses joueurs en mettant leurs noms derrière les maillots… Il s’agit de faire que ce sport reste un sport de combat collectif, sans mettre en danger ses pratiquants.

Dans la foulée, Eric Bayle évoque l’évolution des règles dans le rugby. Extrait:

C’est autant le boulot du commentateur que celui du consultant de connaître les règles. Posez la question aux arbitres : demandez-leur qui est le journaliste le plus casse-bonbon de la planète rugby vis-à-vis d’eux, et je suis presque certain qu’ils vous citeront mon nom (rires). Avant chaque match, je vais les voir, pour leur demander telle ou telle précision sur telle ou telle règle, ce qui les oblige parfois à appeler leur supérieur hiérarchique pour me répondre. Se tenir au courant de l’évolution des règles, c’est essentiel.

Par exemple, on a commenté les France-Argentine avec des règles différentes de celles du Top 14, ce n’est pas simple mais c’est ce qui fait aussi le sel de ce sport. Il faut en permanence se tenir au courant de ses évolutions tactiques et réglementaires.

Pour rester à la page, les consultants Canal + rencontrent les arbitres du Top 14 une fois par an. Extrait:

Tous les ans, ce n’est pas si facile mais on arrive au moins à faire ça régulièrement, quand même, parfois par le biais de visioconférences avec des garçons comme Romain Poite ou Mathieu Raynal. Mais ça n’empêche pas d’apprendre des choses au dernier moment. Dernièrement, sur un match de Top 14, j’ai appris qu’un arbitre avait refusé à une équipe de choisir son côté du terrain en sortant du vestiaire, comme cela a toujours été toléré par la coutume. Elle doit le dire au moment du toss, ainsi le veut la règle internationale. C’est quelque chose dont, modestement, je n’étais pas au courant.

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