En France, les joueurs se taisent pour éviter de voir leur carrière mal tourner
En France, les joueurs se taisent pour éviter de voir leur carrière mal tourner
Le vendredi 12 janvier 2024 à 1:23 par David Demri
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Le journal L’équipe consacre un long reportage sur les commotions cérébrales.
Au Royaume-Uni, près de 300 rugbymen amateurs et professionnels se sont rassemblés pour porter plainte contre les instances du rugby.
En revanche, en France, une vingtaine de joueurs s’est rassemblée dont seulement deux Français, à savoir Quentin Garcia et Sarah Chlagou.
Les avocats des joueurs estiment que les joueurs craignent de parler pour leur image. Extrait:
« Il existe de fortes craintes et des joueurs renoncent à agir par peur des conséquences en termes d’image ou de carrière. »
L’ex-joueuse de Rennes, Sarah Chlagou n’hésite pas à parler, elle qui en a terminé avec sa carrière.
Elle regrette l’omerta autour de ce sujet. Et pour cause, elle a perdu une opportunité d’emploi en raison de sa participation à cette plainte collective.
La jeune femme de 26 ans s’est confiée via L’équipe. Extrait:
« Aucun d’entre nous ne nie avoir voulu jouer, être sur le terrain à tout prix. Moi-même, j’ai forcé pour ça, je n’ai pas pris le temps qu’il fallait pour récupérer, j’ai falsifié certains protocoles… Mais à aucun moment je n’ai réalisé ce que cela allait engendrer, je ne savais pas ce que j’allais endurer car si je l’avais su, jamais je n’aurais fait tout ça.
Ceux qui disent que Jamie Cudmore ou Carl Hayman sont dans cet état parce qu’ils boivent se trompent complètement. Ils boivent (ou ont bu) parce qu’ils sont dans cet état. Cela crée des pulsions addictives terribles, on a l’impression que ça va calmer les douleurs insoutenables que l’on ressent. »
L’ancien joueur des Saracens, Ben Pegna explique pourquoi les Français ne veulent pas parler. Extrait:
« La puissance économique du Top 14 est un des facteurs qui incite les joueurs à ne pas parler. Dans une petite ville comme Brive par exemple, où les acteurs locaux sont souvent des sponsors du club, c’est dur de parler quand on croise les gens tous les jours. Chez nous, le rugby est en souffrance, des clubs ferment, les structures ne sont pas les mêmes. »
L’ancien joueur de Biarritz, Benoit Guyot confirme cette tendance. Extrait:
« Au Royaume-Uni, le rugby est vraiment considéré comme une activité professionnelle alors que chez nous, c’est plutôt : « On a la chance de faire ce qu’on fait alors on la ferme ». La parole est de plus en plus contrôlée, le sportif n’est pas là pour prendre position. D’ailleurs, aucun joueur français de premier rang ne s’exprime sur le sujet, il n’y a pas de leader comme Steve Thompson, Alix Popham ou Carl Hayman.
En France, on baigne encore dans cet environnement viril où celui qui s’oppose au groupe pour des raisons qu’on ne pense pas réelles est rejeté. Sans vrai leader, c’est une position très difficile à tenir. »
L’ancien talonneur de Chambéry, Quentin Garcia estime que tout va prochainement exploser. Extrait:
« En France, c’est la loi du silence, le sujet des commotions n’est pas véritablement abordé – dans le sens : que met-on en place pour que les mentalités changent, pour que les joueurs soient protégés en amont ? – alors que c’est censé être le Championnat le plus professionnel. Pourtant, on est seulement au début du problème ; cela va exploser, de plus en plus de joueurs comprennent. »
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