Bakkies Botha n’a toujours pas cédé à la provocation. « L’exécuteur » est devenu un agneau

Sur la planète ovale, on le surnomme depuis des années « The Enforcer ». L’Exécuteur. D’épaules, de têtes qui dépassent des rucks, d’internationaux en tout genre (Stirling Mortlock, Berrick Barnes, Adam Jones, Jimmy Cowan), tous victimes de la force animale de ce joueur hors normes. Cela lui a valu des mois et des mois de suspension et quelques gratifications, comme celle d’être sélectionné dans le quinze des bad boys du rugby juste avant la dernière Coupe du monde. Bakkies Botha a donc débarqué à Toulon précédé d’une réputation sulfureuse et d’un palmarès de quatre cartons jaunes et deux rouges avec les Springboks.

« Je suis de la vieille école »

On s’attendait à le voir finir un match sur deux en Top 14, mais depuis ses débuts à Biarritz, fin décembre, et en six matchs, l’homme est irréprochable. Un véritable petit agneau tout mignon qui rit quand un Pascal Papé ou un Mamuka Gorgodze lui cherchent des noises. « Ils m’ont provoqué car ils savent que je suis colérique. Ils ont voulu m’impliquer dans des accrochages, mais bon, je suis de la vieille école ! Je les vois venir à dix kilomètres pour me faire faire des choses qui seront préjudiciables à mon équipe. Si Papé et consorts voient qu’ils n’arrivent pas à me faire dégoupiller, ils en sortent frustrés. Pour moi, c’est comme si j’avais remporté une victoire sur eux et c’est pourquoi vous me voyez rire », explique le deuxième ligne.

« J’ai l’impression que c’est lui qui a réussi à faire sortir Papé et Gorgodze de leurs gonds. Il a du métier. C’est la classe internationale ! », savoure Mourad Boudjellal, subjugué par son joueur. « On avait peur qu’il pète un fusible car sur plusieurs vidéos, on voit que beaucoup de joueurs adverses le branchent, poursuit le président du RCT. Il se retient complètement. C’est très bien. »

Bakkies le terrible se serait-il assagi ? À 32 ans… « C’est nouveau pour moi, rigole-t-il. J’ai attendu la fin de ma carrière pour apprendre à mieux me maîtriser, mais c’est parce que je suis devenu un joueur aguerri qui a beaucoup appris de son passé. J’aime toujours autant l’aspect physique du jeu, mais je suis devenu plus sage. Par le passé, j’ai été impliqué dans plusieurs incidents, mais ce n’était pas prémédité (on jettera un voile pudique sur le coup de tête donné au All Black Jimmy Cowan à la suite d’un plaquage, en juillet 2010 Ndlr).Je voulais juste être un joueur physique mais dans la règle. C’est toujours le cas aujourd’hui même si les gars font tout pour que je frappe le premier. »

« Je n’ai plus rien à me prouver »

Cela ne serait probablement pas du goût de Bernard Laporte, intransigeant sur la discipline de son groupe. «Il ne m’a pas donné d’instructions particulières», assure le Sud-Africain, qui s’est plutôt fié à son ressenti général.

« Coach Laporte n’aime pas quand ses joueurs sortent du cadre du jeu. Il est un entraîneur strict, qui veut que nous allions tous dans la même direction. On doit se concentrer sur le jeu et uniquement sur le jeu. Moi, je sais ce que je vaux sur un terrain. Je n’ai plus rien à me prouver. Je peux être ce joueur très physique que tout le monde attend. Mais pour Toulon et le RCT, je veux être le plus positif possible sur le terrain. L’équipe passe toujours en premier et si elle progresse un peu grâce à moi, j’en suis heureux. »

Un homme heureux qui est en train de monter en puissance doucement mais sûrement. Titulaire à Paris et face à Montpellier, le deuxième ligne s’installe peu à peu dans la peau d’un des patrons de l’équipe. « Pour être honnête, je me sens vraiment bien et relax depuis le match face au Stade Français. À Paris, je n’avais plus joué pendant 80 minutes depuis longtemps. Face à Montpellier, je pense avoir fait mon meilleur match avec le RCT. Je commence à retrouver ma forme et à bien me repérer dans les systèmes de jeu souhaités par les coaches. Je sens mieux le club, j’ai de bonnes vibrations, je comprends mieux le français… Je suis tout juste de retour et je peux être encore meilleur. »

Cela tombe bien, il reste quelques matches à jouer avant les phases finales domestiques et européennes. En espérant que l’Exécuteur ne resurgisse pas comme un vieux démon. L’agneau naissant n’y survivrait pas.

Source: varmatin.com