L’ancien sélectionneur du XV de France, Pierre Berbizier a rédigé un édito pour Le Parisien.

Il y dévoile ses derniers conseils adressés au XV de France à l’approche de l’ouverture du Mondial.

Il indique notamment que les Bleus ne doivent pas se laisser submerger par l’enjeu et la pression. Extrait:

« La France débute « sa » Coupe du monde à domicile par un choc face aux All Blacks. Même si une défaite ne serait pas éliminatoire, attention, les conséquences ne seraient pas neutres. L’enjeu de ce match est énorme. Pour moi, il conditionne la Coupe du monde parce que :

1. En tant que pays organisateur, une victoire est obligatoire pour surfer sur l’engouement populaire

2. Les Bleus doivent marquer les esprits et envoyer un message aux autres favoris. 3.

Il faut éviter un dernier match de poule décisif et piégeux face à l’Italie (le 8 octobre) pour ne pas laisser d’énergie en route avant les quarts de finale.

4. Il faut terminer premier de poule pour éviter, a priori, les Springboks en quarts.

Je le dis souvent mais la victoire finale dans une Coupe du monde se joue sur la gestion de l’énergie individuelle et collective : soit tu l’optimises, soit tu la dilapides. Là, les Bleus ont déjà bouffé pas mal d’énergie, entre l’affaire Chalureau, les blessés, etc. Alors je dis attention.

Mais je dis aussi aux Bleus de ne pas se laisser submerger par cet environnement. L’enjeu ne doit pas tuer le jeu, comme cela fut le cas en 2007 lors du match d’ouverture face à l’Argentine. J’attends d’eux qu’ils se libèrent, qu’ils prennent le jeu à leur compte, imposent leur intensité et dictent le rythme du match aux All Blacks. En clair, j’attends d’eux qu’ils soient dans l’action et non dans la réaction. La chance, car pour moi c’est une chance plus qu’une menace, c’est qu’on affronte une équipe néo-zélandaise blessée, en plein doute, encore traumatisée par le concassage en règle subi face aux Springboks lors du dernier match de préparation.

Plus largement, cette équipe est entrée depuis deux ans dans un cycle d’irrégularités et d’inconstance qui ne lui ressemble pas. C’est du jamais-vu dans son histoire ! Depuis quinze jours, les All Blacks sont sous une pression populaire et médiatique très forte, qui use les esprits. Or, je ne vois pas chez eux de vrai leader, le capitaine, Sam Cane, est contesté, tout comme le sélectionneur, Ian Foster…

Les Bleus doivent se servir de tout ça pour, dès le début du match, leur maintenir la tête sous l’eau, les empêcher de respirer, leur imposer une pression défensive infernale, notamment sur leur charnière et leur milieu de terrain, qui est une zone fragile pour eux. Bref, faire en sorte que le poison du doute reste bien ancré dans les têtes des All Blacks et qu’ils ne nous le refilent pas.

Le XV de France, qui sort d’un dernier match de préparation probant face à l’Australie, avance, lui, avec des certitudes, même si certaines demeurent fragiles, et des convictions. Il a l’ambition et les moyens de guider son propre destin. Il doit en rester maître. C’est déjà tout l’enjeu de ce match-là. »