Pilier du Stade Français de 1997 à 2010 et vainqueur de cinq Boucliers de Brennus avec le club parisien, Sylvain Marconnet revient pour Rugby365 sur l’annonce choc de la fusion entre le Racing et le Stade Français. Triste dans un premier temps, l’ancien international veut désormais aller de l’avant et voir un très grand club à Paris et en Ile-de-France.

Sylvain Marconnet, quelle est votre réaction à l’annonce de la fusion entre le Racing 92 et le Stade Français ?
Au début, spontanément, j’étais un peu triste, surtout pour un vieux con comme moi qui a porté le maillot rose. Mais après, on voit dans l’économie que l’actualité est aux fusions. On a les deux derniers champions de France qui s’associent, j’espère que ça sera pour former un très grand club, qui deviendra très vite une référence en termes de formation et de résultats. Il est clair que la surprise est grande.

On a plus l’impression que cette fusion est en fait une absorption du Stade Français par le Racing, cela vous fait-il peur, en tant qu’ancien Parisien ?
Dans la mesure où le Stade Français vit encore une saison compliquée, voit nombre de ses joueurs partir, c’est sûr que ça donne plus l’impression que c’est le Stade Français qui est intégré au Racing. Mais on a deux garçons intelligents (Thomas Savare et Jacky Lorenzetti, ndlr), qui ont eu des réussites professionnelles, et certainement qu’ils ont tout posé sur la table et que les deux cultures seront respectées, même s’il faudra en créer une nouvelle. Forcément, quand il y a fusion, il y a un peu de dommages, on se demande ce que ça va donner. On peut être perplexe. C’est sûr qu’au début j’étais un peu sceptique car on avait un peu construit notre palmarès sur cette rivalité. J’osais penser qu’il y avait la place pour deux clubs à Paris. Il y en a je ne sais combien à Londres… J’espère qu’il n’y aura pas un club qui sera lésé par rapport à un autre, que tout se passera bien et que ce sera une nouvelle référence dans le rugby européen.

MARCONNET : « IL FAUT QUE LES SUPPORTERS SE DISENT QU’ILS SONT TOUS PARISIENS »

Beaucoup de questions se posent concrètement désormais. Le stade, le logo, les couleurs, le nom du club…, comment voyez-vous les choses ?
Le Racing a lancé son projet de stade, donc je pense que la future équipe évoluera dans ce stade tout neuf. Ça me parait acquis, même si Jean-Bouin vient d’être rénové. Quoi qu’il en soit, j’ai entière confiance dans les deux présidents pour ménager les susceptibilités, les attentes des supporters et des partenaires, et pour faire un grand club. Il y a deux moyens : soit on est réfractaire et on se dit que c’était mieux avant, soit on va de l’avant. Et moi, je vais plus de l’avant en me disant qu’ils ont certainement bien mûri leur projet et que c’est la solution. Je vais plutôt adhérer derrière ce projet plutôt que de jouer au vieux con. En espérant que cette entité soit compétitive et qu’on soit rapidement rassuré sur un certain nombre de choses. En tout cas, ça fait bizarre. J’ai évolué treize ans sous le maillot rose du Stade Français et je n’ai pas envie de le voir disparaître. J’ai envie de le voir évoluer. J’espère que tout le monde aura toujours sa place dans ce projet.

Les supporters des deux clubs ont pris un gros coup sur la tête ce lundi…
Oui, certainement. Mais il faut qu’ils se disent qu’ils sont tous Parisiens, qu’ils ont la même passion qui est le rugby. Les supporters du Stade Français et du Racing souffrent cette année. Il faut qu’ils se disent qu’ils vont voir la création d’une entité magnifique, certainement dotée de moyens considérables pour être attractive. A priori, aujourd’hui les choses sont acquises, donc il vaut mieux adhérer et amener toute l’énergie nécessaire pour que cette future entité aille de l’avant et ait les résultats escomptés.

MARCONNET : « A PRIORI, L’AVENIR DU RUGBY PASSE PAR DE TELLES FRANCHISES »

Peut-on s’attendre à une grosse mobilisation des supporters et joueurs du Stade Français, contre ce qui ressemble à une absorption par le Racing ?
Il va y avoir des tensions, forcément. Mais je pense que c’est trop tard car l’affaire est entendue. Après, je comprends la position des joueurs, car quand vous avez des effectifs de 35-40 personnes, qui vont former un seul effectif, forcément il y aura des gens sur le carreau. C’est normal qu’on essaie de se mobiliser pour se faire entendre, mais il me semble qu’il vaut mieux dépenser son énergie pour que la fusion soit une réussite. Aujourd’hui, deux clubs diamétralement opposés vont se marier. C’est une première, mais je suis persuadé que ça va amener d’autres. Et ça va un peu révolutionner le paysage rugbystique.

L’an passé, Bayonne et Biarritz avaient été tout proches de fusionner. Aujourd’hui, le Stade Français et le Racing franchissent le pas. Est-ce l’avenir du rugby français ?
A priori, l’avenir du rugby passe par de telles franchises et des fusions pour être compétitif sur le marché. En vingt ans, on n’a jamais trouvé de modèle économique dans le rugby, quand on voit le déficit récurrent des clubs. Est-ce que cette fusion va montrer un nouveau modèle ? Peut-être. Dans ces fusions, il faut aussi voir des opportunités. Paris a un rayonnement européen, de manière pérenne. Si tout est bien réfléchi, bien organisé, il n’y a pas de raison que ça ne marche pas. Moi, ça m’excite. Et là où je suis rassuré, c’est quand même que ce sont deux pilotes d’industrie qui sont à la tête de ces clubs, ils ont très certainement dû faire des fusions-acquisitions pendant leur carrière professionnelle, et ils connaissent la complexité d’un tel mécanisme. A eux de nous rassurer, même si je n’ai pas envie d’être inquiet.

Source: rugby365.fr