On vous a vu souffrir lors de la finale de la Coupe d’Europe. Ce rôle de président ne finit-il pas par être trop usant ?

Mourad BOUDJELLAL: Ça me ronge. J’ai même des séquelles physiques. Je développe des allergies… même mes médecins me disent de me calmer. Mais on est dans un sport émotionnel. C’est d’ailleurs ce que ne comprennent pas encore certains présidents. Ils ont été de grands chefs d’entreprise, comme Jacky Lorenzetti, Thomas Savare ou Mohed Altrad, mais le modèle entrepreneurial sportif n’a rien à voir avec le modèle classique. Dans ce dernier, on construit des fondations sur lesquelles on génère de l’argent. Dans le sport, ce ne sont pas les fondations qui donnent l’argent, mais l’émotion. Quand on a ça, on entraine de l’argent. Ce n’est pas le stade et la qualité des sièges qui créent l’économie d’un club. Si on n’a pas d’émotion, les sièges du stade seront vides.

Avec toutes ces émotions et leurs impacts sur votre vie, jusqu’à quand vous voyez-vous à la tête du RCT ?

M.B: Il me reste un an de convention, je vais signer à nouveau pour cinq ans car il y a des choses en chantier, et ce sera la dernière. Sauf s’il se passe des choses avant qui me poussent à partir. Personne n’est à l’abri de mauvaises nouvelles.

Sur ces six prochaines années, quels sont les défis que vous allez vous fixer maintenant que vous avez tout gagné ?

M.B: Dans un championnat qui devient de plus en plus concurrentiel, le défi est de rester dans les premiers. On doit aussi bien gérer la dernière année de Bernard Laporte, et être capables de faire l’après avec Diego Dominguez. On commence à s’attaquer aux structures du club. Comme je l’ai dit, jusqu’à présent tout était basé sur l’émotion, maintenant on peut construire. Je veux partir avec un club bien en place.

Parmi les projets, est-il envisageable de voir un RCT féminin dans les prochaines années ?

M. B: On travaille effectivement sur une section féminine qui verra le jour en 2016-17. J’ai été épaté par le rugby féminin, j’y crois plus que dans le VII. Dans le sport, deux choses sont importantes : premièrement le scenario. Et dans le VII, on connait très vite l’assassin. Deuxième point important, le coup de théâtre, à savoir l’essai. Dans le VII, il n’a pas de valeur. On retrouve par contre tout cela dans le rugby féminin. En regardant la Coupe du monde Féminines, on a tous retrouvé un certain confort visuel face à un rugby que l’on connaissait, un rugby d’avant. J’ai pris un pied incroyable avec cette compétition. Je me suis dit : « il y a un truc ». C’est pour cela que je veux monter une section féminine.

Si l’on a bien compris, vous raccrocherez en 2021. Avez-vous déjà une idée de ce que vous allez faire par la suite ?

M. B: Je n’irai pas dans les tribunes en espérant que le club perde. Je n’irai plus au stade, je ne veux pas être un aigri. Je passerai à autre chose, ce qui est vécu est vécu, je ne suis pas un nostalgique. J’ai des projets. J’ai réussi deux vies, j’espère faire de même pour la troisième. Il faut que ce soit par passion, j’ai été éditeur par passion, président de club pour la même raison. Je dois avoir la flamme. En ce moment, j’ai pas mal d’offres dans les médias (il sera consultant pour Canal+ et Europe 1 lors de la Coupe du monde, ndlr), il faut que je trouve.

Source: rugbyrama.fr