Mourad Boudjellal: « Je ne pense qu’au prochain match de Top 14, contre Castres »
Mourad Boudjellal: « Je ne pense qu’au prochain match de Top 14, contre Castres »
Le jeudi 7 mai 2015 à 17:40 par David Demri
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Je n’étais pas du tout au courant qu’on avait autorisé les caméras dans le vestiaire. Je ne sais pas qui de chez nous a pris cette décision ! Il y avait un petit écran pas loin de moi. Quand Clermont dominait, je me retournais, je ne voulais pas voir ça. Tant que le bruit dans le stade ne montait pas, c’était bon signe. Il n’y a que quand on avait le ballon que je regardais l’écran. Je suis sorti du vestiaire une ou deux minutes mais c’était impossible d’aller plus loin. J’ai fait demi-tour et je suis retourné dans le vestiaire jusqu’à la fin du match.
Vous avez pris le temps de revoir le match depuis ?
Oui. Et je regrette de ne pas l’avoir vu en direct, je suis vraiment con ! Là, je l’ai regardé comme un épisode de Columbo : je connaissais l’identité du coupable dès le début mais je me demandais comment on allait en arriver là.
Mais pourquoi le stress vous ronge-t-il à ce point ?
Je redoute ces matches dès le début de la saison. Enfin, d’abord, je redoute de ne pas y être ! Mais oui, savoir qu’on peut tout perdre sur un match, c’est une torture. Un match à élimination directe, c’est un vrai poison. J’ai investi 7 millions dans ce club. Si ça n’avait pas marché, ça aurait été une catastrophe. J’ai mis en danger ma famille. Et puis, j’ai pris des coups. On m’entend souvent parler avant les matches. Tout ça, je le fais pour protéger les joueurs. Je ne m’investis pas à moitié. Vraiment pas.
La fierté de ce troisième titre européen de suite, c’est quoi ? Avoir gagné sans Jonny Wilkinson ?
C’est d’avoir gagné avec une vraie équipe, une équipe multi-raciale. J’ai toujours dit que je me sentais plus proche de quelqu’un qui est né à 10 000 kilomètres de chez moi mais qui est sur la même longueur d’ondes que moi, plutôt qu’un voisin dont je n’ai rien à foutre. Le monde de demain, c’est ça. On est tous les mêmes. Aujourd’hui, tous les enfants de la planète ont les mêmes références culturelles. Tout s’universalise. On mettait plus de temps pour aller de Toulon à Paris au Moyen Âge qu’on en met aujourd’hui pour faire Paris-New York.
Une partie du public continue d’estimer que Toulon a une équipe de mercenaires et résume votre club à sa puissance financière…
Il y a des présidents de rugby richissimes, ce n’est pas une tare ! Seulement, certains ne l’ont pas encore compris. Déjà, par définition, le mercenaire est payé pour défendre une cause qui n’est pas la sienne. Or, là, on n’est pas dans ce cas de figure. À Toulon, on n’a pas de milliardaire qui nous aide. Au lieu de dire qu’on est un magnifique modèle économique, on nous reproche d’acheter de très bons joueurs. C’est une forme de racisme parce que ce sont à chaque fois les étrangers qui sont visés. Quand un international français va de Toulouse à Clermont, on entend moins ces critiques. Par les temps qui courent, ça me dérange. Au rugby, il y a un modèle très conservateur qui est en place. On a l’impression que le club est au service de l’équipe de France. Comme si on avait une mission de délégation publique !
On entend souvent vos joueurs, comme le Sud-Africain Bakkies Botha dimanche dernier, remercier tout le département du Var. Est-ce que partager votre amour pour le pays varois dès qu’un joueur arrive de l’étranger est votre secret pour l’intégrer au RCT ?
Quand Bakkies dit ça, il s’agit d’une démarche personnelle. Je ne donne aucune consigne. On n’a pas de spécialiste en communication chez nous. Quand un joueur arrive, on lui explique l’histoire de ce club, mais ça s’arrête là. Le rugby, c’est un théâtre. C’est une salle pleine qui vibre. La magie opère quand il se passe un truc entre les acteurs et le public. Mais il n’y a pas de stars à Toulon. Honnêtement, notre fonctionnement est celui d’un club de Fédérale 1. Jonny Wilkinson, si on devait faire douze heures de bus, eh ben il faisait douze heures de bus. Il ne faut pas croire qu’on passe notre vie à se déplacer en jet privé.
Au fait, à quoi a ressemblé votre journée de dimanche, le lendemain du triplé ?
On est arrivés à 5h15 à l’aéroport (de Hyères-Toulon, ndlr). À 6h15, je me couchais. Le réveil a sonné à 9h. Avant de boire mon café, je suis allé acheter la presse, en espérant qu’il reste des journaux. Ça fait partie des petits bonheurs car je m’attendais évidemment à ne lire que des choses positives. Puis, j’ai donc bu mon café en lisant, et en flattant mon ego. Je suis ensuite allé faire le marché du Mourillon. Après, j’avais privatisé un lieu pour qu’on puisse fêter ça, picoler un peu. J’ai remis ça le soir avec des amis très proches. À 21h50, j’ai reçu un SMS qui me disait que j’étais l’invité du Grand Journal le lendemain, alors j’ai arrêté de picoler. Voilà, la fête a duré un jour. Mais depuis, je ne pense qu’au prochain match de Top 14, contre Castres.
Source: society-magazine.fr
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3 Commentaires
Exact, il y a peut être des mercenaires à Toulon, pourquoi pas, mais un joueur français qui vient de Toulouse pour aller à Clermont? C’est pareil ! !
Le rugby est professionnel donc les mutations s’enchainent et on ne va ps demander à Botha d’être un amoureux de Toulon quand il arrive (pareil pour Mastri quand il est parti à Toulouse par exemple).
Maintenant si le joueur fait son boulot et qu’en plus il aime la ville ou il joue….c’est tant mieux.
Pour finir, je serais curieux de savoir – pour tous les clubs – combien de joueurs sont natifs de la vile de leur club. Ca me gonfle cette histoire de mercenaires (et je parle pour tous les sports professionnels….c’est leur travail)Ca ne gène personne de changer de ville pour chercher un emploi et pourtant on peut le rapprocher d’un joueur de rugby me… ! ! !
President quand le match est deloc a nice on met plus de temps aller retour et match que de faire nice new york
J’aime beaucoup le passage sur les mercenaires ! Chaque fois qu’on parle du RCT comme d’un club de mercenaires, j’ai envie d’offrir un dictionnaire en cadeau à tous ceux qui utilisent ce mot sans comprendre ce que ça veux dire.
Un mercenaire est payé pour aller au combat mais il n’en a rien à faire de la cause défendue, ni du résultat de la bataille ! Or pour les joueurs de rugby comme pour les autres sportifs, il me semble que la cause défendue (gagner et ramener des titres) est une cause partagée par tous (club, joueurs, supporters).
Tous les sportifs de haut niveau ont envie de gagner des compétitions, et jamais seulement pour leur pays, leur ville ou leur club mais aussi pour eux ! Tout compétiteur a envie d’agrandir son palmarès. Donc les joueurs du RCT mouillent le maillot sur le terrain pour défendre la même cause que celle du club qui les a embauchés, par définition ce ne sont pas des mercenaires qu’ils soient nés à Toulon, ailleurs en France ou à l’autre bout du monde !