On ne saura peut-être jamais si le forfait de Maxime Mermoz, officialisé vendredi, est un magistral coup de bluff de Pierre Mignoni, voire de Laporte : l’ancien perpignanais ayant servi alors à brouiller les pistes, ou plutôt à embrumer les cerveaux clermontois. La légende est en marche et Mermoz devra encore attendre avant d’être sacré, comme titulaire, au RCT.

Pour l’heure, l’absent a vu une doublette inédite éclabousser la première finale de Champions Cup : Bastareaud-Hernandez, comme un nouvel alliage fait de puissance et d’aisance. Les deux hommes ne sont pas des inconnus. Ils ont partagé quelques matchs au Stade français, aux débuts de « Basta », en 2007-2008. À l’époque, « El Mago » vibrait à l’ouverture, son compère au centre. Déjà en mode déménageur.

Sept ans plus tard, le magicien a migré vers le numéro 12. Avec Giteau en mode ouvreur pour désarçonner les premiers défenseurs auvergnats. Dans son sillage, Bastareaud et Hernandez ont fait preuve d’une étonnante complicité en plus d’une complémentarité évidente. La puissance de l’un a profité de la vitesse de l’autre et plus encore des espaces qu’il a su lui ménager. Le bulldozer a joué son rôle, en défiant directement ses adversaires, servant aussi de leurre pour libérer son partenaire. Gagnant-gagnant.

Compliqué ? Juan Martin Hernandez réfutait l’idée, juste avant de quitter Twickenham. « J’ai connu plusieurs postes durant ma carrière et je sais m’adapter. Ce n’est pas un problème. Avec Mathieu, encore moins puisque nous nous connaissons bien. Cette semaine, avant le match, il m’a beaucoup aidé pour intégrer les combinaisons et, ainsi, trouver plus rapidement des repères collectifs. »

DUELS GAGNÉS

Hernandez, celui qui ose, a esquissé les premiers assauts en début de match, quand les siens étaient encore dominés par la fougue auvergnate. Quelques espaces infimes et pourtant gagnés, dans le dos de Bastareaud. Et autant de ballons « lâchés » au contact ou après franchissements qui vinrent souligner le génie du magicien argentin, ses mains en or massif et sa gestuelle parfaite. Juste ce qu’il faut d’intelligence pour « casser » la ligne défensive clermontoise, y gagner de précieux centimètres et trouver des soutiens. Autant de duels gagnés.

« C’est toujours plus facile quand on joue dans l’avancée. Et c’est surtout plus facile quand on est entouré de joueurs aussi talentueux : Giteau, Habana, Mitchell, Halfpenny, « Basta »… Quand les gens sentent le rugby, les choses se font presque naturellement. Il faut le dire, dans cette équipe on se rate rarement dans les grands matchs. Il y a comme un supplément d’âme lors des grands rendez-vous. » La preuve, Hernandez et Bastareaud ont gagné samedi la guerre du milieu de terrain, celle des impacts, des espaces et de la ligne d’avantage. Chacun dans un rôle précis et dans des modes totalement opposés. Mais tous deux avec la même efficacité.

« Nous avons simplement essayé de montrer ce que nous savons faire. Chacun ses qualités, ses points forts. » Hernandez souvent dans l’espace, Bastareaud, lui, comme d’habitude en mode boulet de canon. Et c’est d’ailleurs à ce prix qu’il trouva la faille, juste avant la mi-temps, oubliant un surnombre pour marquer en force l’essai qui permit aux doubles champions d’Europe de prendre l’avantage et de s’envoler vers ce fameux triplé. Le premier pour El Mago. Le troisième pour Bastareaud. Pour peu que ses côtes, touchées en fin de match, laissent l’Argentin tranquille, Pierre Mignoni pourrait bien avoir de la suite dans les idées d’ici au sommet du Top 14…

Source: Midi Olympique