« Sud Ouest ». Vous parliez d’une « libido » toulonnaise « plus axée sur le triplé en Coupe d’Europe ». Avez-vous retrouvé l’excitation du Top 14, avec ce match à La Rochelle ?

Mourad Boudjellal. Pour être tout à fait sincère, on a encore un peu la tête à la Coupe d’Europe, parce que ce match est glissé entre la demi-finale contre le Leinster et la finale contre Clermont (le 2 mai à Twickenham, NDLR)… Dire que j’ai la même angoisse, le même stress que d’habitude, ce serait mentir. C’est sûrement un match que l’on va regarder de façon très décontractée. Dans le pire des cas, on prendra zéro point, c’est une certitude. Quand on est sur une série de matches à élimination directe, c’est difficile de retrouver la même intensité. On peut perdre à La Rochelle et être à Bordeaux (lieu des demi-finales, NDLR) quand même. En revanche, pour les Rochelais, c’est un match à qualification directe, car une victoire les laisserait en Top 14, ce qui ne serait pas immérité vu leur saison.

Comment abordez-vous ces semaines coincées entre une demie et une finale ?

C’est très particulier. Par exemple, mercredi, il y avait beaucoup de monde au point presse, et je pensais que c’était celui de Clermont. On est vraiment sur un autre match. Quand on parle avec le staff, avec les joueurs, ce n’est qu’à propos de Clermont.

Mais des joueurs comme Mamuka Gorgodze, absent en demi-finale, auront à cœur d’être performant.

Oui, mais ils savent que ce n’est pas forcément ce qui leur fera jouer la finale. On a affaire à des professionnels. Mais je sais trop que dans le rugby, la volonté est quelque chose de primordial. Et elle sera, avec l’énergie, du côté de La Rochelle, une équipe qui a bien recruté. J’en suis content puisque je m’étais un peu attrapé avec Vincent Merling (le président du Stade Rochelais), il y a quelques années, à propos des non-Jiff, qu’on appelait les étrangers. Je vois qu’il a compris que l’apport de joueurs étrangers a beaucoup souri au Stade Rochelais, aussi. Sans eux, je ne suis pas sûr qu’ils seraient remontés.

Il y a quatre ans, vous évoquiez le fait que La Rochelle pouvait devenir le Toulon de l’Atlantique.

(Il coupe.) Oui, parce que c’est un club où il y a un engouement très fort, je pense sincèrement que s’ils ont la chance de se maintenir, ils vont construire quelque chose de solide pour les années à venir. Ils ont regardé ce qui marchait, et ils ont copié cela plutôt que ce qui ne marchait pas. Je crois que le président Merling a beaucoup évolué. Le Stade Rochelais fait partie des clubs qui peuvent représenter un véritable modèle économique dans le Top 14. Il faut un peu de temps, et un premier socle, le public. Ils l’ont. Le deuxième, c’est un gros réseau de partenaires, ils sont en train de le construire. Le troisième, c’est un savoir-faire pour thésauriser là-dessus, et puis, il faut aussi étendre sa zone d’achalandise, en sortant un match ou deux.

Y a-t-il des joueurs, à La Rochelle, que vous verriez bien à Toulon ?

Il y en a un qui a été courtisé par pas mal de clubs, tout le monde le sait, c’est Atonio. Mais il y a aussi Alofa, qui peut être « travaillé » somme une star, les troisième ligne Gourdon et Goujon, qui sont très intéressants. Il y a un bon vivier de joueurs. D’ailleurs, je souhaite bonne chance à La Rochelle, car je trouve que cette équipe a amené quelque chose : ce public, cette envie de jouer. J’ai regardé quelques-uns de ses matchs, et je me suis régalé. C’est un club qui a une âme, et rien que pour ça, je souhaite qu’il reste en Top 14.

Source: sudouest.fr